Le plan B

Ma grand-mère était farfelue.
Elle avait un plan B, pour le cas où les affaires familiales tourneraient mal: ouvrir une baraque à frites sur une plage de la côte d’Azur.
Alors vous allez me dire que ça n’a rien d’extraordinaire. Mais justement, si. Tout avec elle était extraordinaire. Comme la boîte qu’elle gardait dans le buffet de la cuisine. L’étiquette sur le couvercle indiquait « Petits objets ne pouvant servir à rien », écrit de sa jolie écriture soignée, toute en pleins et déliés.
Le plan B était simple: si le cinéma familial ne faisait plus assez d’entrées pour nourrir la famille, nous partirions tous sur la nationale 7, elle dans son tailleur Chanel impeccable, mon grand-père dans son meilleur costume et nous autres entassés à l’arrière de la DS bleu ciel, la boîte aux petits objets ne pouvant servir à rien dans le coffre, avec l’argenterie et sa collection d’estampes japonaises.
Nous remercions chaleureusement le public fidèle du vieux cinéma de nous avoir évité ça.

Florence Caplain

06/03/2023