Comment les particules avaient acquis leur masse ? Ce n’était simple de trouver une théorie quantique de la gravitation dans le modèle standard. Peter Higgs, lui, l’avait modélisée en 1964. Restait à la prouver. Alors, on a construit un collisionneur de particules et après près de soixante ans d’efforts, on allait enfin connaître le succès. Le problème, c’est que à peine apparu, le boson se désintègre presque immédiatement en d’autres particules. Il faut donc déclencher l’appareil au bon moment. On a fait appel à un photographe professionnel qui s’est armé de patience. Et après une multitude d’essais, il a réussi. Ce foutu champs scalaire était enfin là devant nos yeux. On distinguait parfaitement les quarks qui prenaient leur masse par friction dans un nuage d’énergie et les photons qui s’échappaient au loin. J’ai immédiatement appelé Peter pour lui annoncer. Il m’a répondu comme ça « See ? I told you ! » et il a raccroché.

Ça s’agite, ça frémit. Elles ont peigné leurs longs cheveux et lissé leurs écailles.
Aux premières notes de l’orchestre, la danse a pris possession de leurs corps luisants.
Personne ne fait tapisserie, chacune ondule avec les autres portée par les remous, bercée par la houle.
Telle une murmuration d’étourneaux, elles ne forment plus qu’une masse mouvante et harmonieuse, leurs écailles capturent les rais de lumière qui pénètrent la surface de l’eau, dans le silence de l’océan habité de leur chant.
Magie éphémère, l’ombre du premier nuage les cachera aux yeux du navigateur; il n’est pas invité au bal.

D’abord, j’ai inondé et j’ai laissé les eaux mugir. Puis, j’ai sillonné d’encre et les pieuvres sont sorties. Elles ont joué un temps et deux soupirs. Je suis resté à bonne distance. J’ai soufflé : la fumée a couvert l’obscurité. Encore une touche de lumière, encore un rai de souvenirs et mon paysage intérieur est terminé. Il sera pour toujours le premier. Les autres ne seront jamais qu’une ombre.